LES VIADUCS DE PAUL BODIN
A pratiquement un siècle d’intervalle, deux traits d’union relient le département du Tarn au département de l’Aveyron au-dessus du Viaur. Dès 1998, les philatélistes ont été invités à s’en souvenir à Carmaux. Le viaduc ferroviaire sur la ligne Albi-Rodez a vu le jour au début du XXème siècle, et le viaduc routier sur la RN88 de l’axe Lyon-Toulouse a attendu la fin de ce même XXème siècle pour être livré à la circulation et fluidifier les transports routiers. Distants de quelques kms, ils sont tous les deux des oeuvres d’art que nous allons essayer de vous faire apprécier.
LE VIADUC FERROVIAIRE DE PAUL BODIN
LE VIADUC DU VIAUR
1.Contexte
Au milieu du XIXème siècle, la plupart des pays industrialisés disposent d’un réseau ferroviaire. Leur développement rapide est la conséquence de la maîtrise des matériaux sidérurgiques que sont le fer, la fonte et l’acier. De plus, les progrès réalisés dans la fabrication de la chaux et des ciments artificiels ont conduit à l’amélioration des techniques de construction des ouvrages d’art, jalons indispensables de la création des voies ferrées.
Il est bon de rappeler ici que le coût du transport ferroviaire est d’autant plus faible que le profil des voies est proche de l’horizontale et que leur tracé est rectiligne. Ces règles découlent des qualités du roulement fer sur fer. Ainsi en 1826, un seul cheval pouvait tirer un train de 10 tonnes sur la voie ferrée historique de Saint Étienne à Andrézieux. Ces règles de base sont impératives et président à l’implantation des lignes ferroviaires. Ainsi, pour s’affranchir du relief, l’ingénieur devra combiner harmonieusement tranchées, remblais, viaducs et tunnels.
Les besoins des entreprises ferroviaires sont à l’origine du développement rapide des ponts métalliques, dont la construction est devenue économiquement plus avantageuse que celle des ponts maçonnés. L’Angleterre est à l’avant garde du progrès et, avant 1850, elle réalise plusieurs ouvrages exceptionnels. La France, encore affaiblie par les guerres napoléoniennes, est à la traîne, et plus tardivement, Gustave Eiffel construit deux ouvrages ferroviaires, l’un au Portugal, le pont Maria Pia en 1877, l’autre en France, le viaduc de Garabit en 1884. Aux États Unis, John Roebling construit le célèbre pont de Brooklyn inauguré le 23 mai 1883.
2.Naissance du projet
Le franchissement de la vallée du Viaur a toujours été un obstacle aux échanges entre les deux zones riveraines. Depuis le Moyen Age, des ponts et des bacs facilitent les traversées, mais ces moyens sont fragiles et dangereux en périodes de crues, et le Segala, qui s’étend sur les deux rives, est un pays pauvre dont les terroirs sont incapables de dégager des excédents de revenus susceptibles d’assurer l’entretien des voies de communication. Au début du XIXème siècle, les transports sont encore assurés par des charrettes tirées par des bêtes de somme. Sont acheminés vers le Rouergue, le verre de Carmaux, les légumes, le blé et le vin du Tarn et aussi la chaux de Blaye pour enrichir les terres du Ségala. A l’inverse arrivent dans l’Albigeois, les fromages de l’Aubrac et du Cantal, et surtout les bestiaux pour achalander les marchés et les foires de Monestiés et d’Albi.
Au milieu du XIXème siècle le développement des lignes de chemin de fer en France est tel que l’idée d’une voie ferrée entre Rodez et Albi est envisagée. Cette liaison devait être un élément de la ligne Lyon-Toulouse. Ce projet s’articule autour du tronçon déjà réalisé entre Carmaux et Albi. Cette petite ligne, autorisée par décret impérial, réalisée essentiellement à partir de capitaux privés, fut ouverte en 1857, raccordée vers Toulouse en 1865 et rachetée par la Compagnie des Chemins de fer du Midi.
Ce n’est qu’en 1875 que la ligne Carmaux-Rodez est reconnue d’intérêt général dans un projet de loi. Le choix du tracé suscita inévitablement d’interminables rivalités locales. Finalement, un tracé parallèle à la RN88 et incluant le franchissement du Viaur fut retenu.
Un évènement extérieur retentissant retarda encore le projet. En Ecosse, le 26 juin 1879, la reine Victoria, à bord du train royal, traversa le Pont du Tay, proche de Dundee en Ecosse et qui venait d’être achevé par Thomas Bouch en 1878, ce qui lui valut l’anoblissement. Malheureusement, quelques mois plus tard, le 28 décembre, un ouragan détruisit cet ouvrage et fit 75 victimes en engloutissant un train. L’histoire ne dit pas si Sir Bouch perdit son titre. Par contre plusieurs projets de ponts, dont certains étaient en cours de réalisation, furent abandonnés. Dans tous les pays, les règles de sécurité furent renforcées et ce n’est qu’en 1888 que l’appel à projets pour le franchissement du Viaur fut lancé. Sept projets furent déposés par cinq candidats dont Gustave Eiffel. La commission fit connaître son choix en 1889. C’est le projet de la Société de construction des Batignolles, présenté par l’ingénieur albigeois Paul Bodin, qui fut retenu. La commission justifia son choix par le fait que l’audace technologique et l’esthétique de l’ouvrage serviraient le rayonnement de l’industrie française. Après plusieurs modifications pour satisfaire la réglementation sur les ouvrages métalliques, Ludovic Dupuy-Dutemps, député de Gaillac et ministre des Travaux Publics, posa la première pierre le 9 mai 1895, mais les travaux ne commencèrent vraiment qu’à la fin de l’année 1896.
3.Description du viaduc
Aujourd’hui encore, la découverte du viaduc au détour d’un chemin ou d’une route est un émerveillement. Le spectateur est frappé par l’apparente fragilité des points d’appui. Cet ouvrage, le seul de ce type en France est dit « à arcs équilibrés »ou « à poutres balancées ». Sur le schéma ci-dessous, du côté tarnais ou du côté aveyronnais, l’encorbellement appuyé sur la rive, allège par effet de contrepoids, la pression développée sur la clé (point X) par le demi-arc central. Ainsi, chaque poutre, constituée d’un encorbellement et d’un demi-arc, a tendance à s’incliner vers la clé articulée au milieu de l’arc central. Ce type d’ouvrage est aussi appelé « pont à poutres cantilever » ou « à poutres en porte à faux ». Le pont de Québec sur le fleuve Saint Laurent est l’ouvrage de ce type ayant la plus longue portée libre au monde (549 mètres). Sa construction dura presque 20 ans. Commencée en 1903, il fut l’objet d’un premier effondrement en 1907 imputé à des fautes de calcul (75 victimes) et d’un deuxième effondrement en 1916 attribué à des défauts de fabrication (13 victimes). Le viaduc du Viaur est un ouvrage ferroviaire à voie unique. Son tablier de 460 mètres de longueur totale surplombe la rivière de 116 mètres. Sur le schéma on distingue les différentes parties métalliques:
- un arc central de 220 mètres
- 2 encorbellements MA et NB de 69,6 mètres
- 2 travées de raccord AC et BD de 25,4 mètres
Cet ensemble métallique est ancré au relief par : – les doubles culées maçonnées en M et N, surmontées d’un sabot dont la rotule peut supporter une pression de 1800 tonnes – les arrières culées maçonnées, en C de 21 mètres et en D de 29 mètres. Solidement fixées au tablier, d’une largeur d’environ 6 mètres, descendent les fermes, structures planes, inclinées de 25 degrés en avant et en arrière de part et d’autre de la verticale. Chaque ferme est ancrée sur une culée et en M ou N, leur écartement est de 33 mètres
4.Les matériaux
L’ensemble des pièces de la charpente métallique du viaduc pèse 3880 tonnes. Trois fabricants ont élaboré et façonné les éléments simples ou complexes destinés à sa construction. Ces entreprises, les Forges du Creusot, les Forges de Denain et les Aciéries de Pompey, étaient à l’époque en France, parmi les plus performantes pour la qualité de leurs productions.Le détail entre les différentes nuances de produits est le suivant:
- acier laminé : 3245 tonnes,
- fer : 371 tonnes,
- acier coulé : 88 tonnes,
- fonte : 29 tonnes,
- rivets ( en fer au début, en acier ensuite ) : 147 tonnes.
La pose des rivets, environ un million d’unités, a été faite manuellement, après chauffage dans des fours portatifs et martelage in situ. Avant d’être livrées sur le chantier du viaduc, les pièces métalliques sont préparées dans les ateliers parisiens de la Société de construction des Batignolles. Les structures maçonnées sur les deux versants du Viaur représentent un volume de 4000 mètres cubes. Des moellons de gneiss d’origine locale ont été employés pour garnir les fouilles et asseoir les blocs aux différents points d’accrochage du viaduc. Les parements et la finition ont été réalisés avec des moellons de Bruniquel et des pierres de granite du Sidobre. Enfin, le sable du Viaur a servi à l’élaboration des mortiers. Ces derniers détails montrent le souci du constructeur d’utiliser des matériaux de proximité pour ne pas alourdir le coût de l’ouvrage.
5.La construction
Les travaux ont duré 6 ans, 200 ouvriers spécialisés sont intervenus sur le chantier, aidés, en cas de besoin, par la main d’oeuvre locale. La réalisation des maçonneries débute en novembre 1896 côté tarnais, et se termine en décembre 1889 côté aveyronnais. Le montage de la structure métallique commence en mars 1897 sous la responsabilité de l’ingénieur en chef Rosario de Volontat et de Jean Compagnon, qui fut chef de chantier du viaduc de Garabit et de la Tour Eiffel. Sur un plateau de quelques hectares, proche de la rive tarnaise du Viaur et relié par rails au chantier du viaduc, les pièces sont assemblées à plat en vraie grandeur pour éviter toute déconvenue en situation réelle, parfois acrobatique. Ce travail préparatoire aboutit à la confection de tronçons assemblés d’un poids maximum limité à 4 tonnes, afin qu’ils puissent être transportés jusqu’au chantier à l’aide d’un chariot dédié. Sur la partie supérieure horizontale d’un échafaudage en bois s’appuyant sur le versant tarnais, un pont roulant, muni de treuils électriques, facilite la mise en place des pièces. Au fur et à mesure de la progression du montage, des pylônes en bois sont dressés pour soutenir l’encorbellement. Des haubans métalliques provisoires fixés sur la rive assurent l’équilibre de l’ensemble avant la construction du demi-arc central. Pour édifier l’encorbellement côté aveyronnais, on déplace l’échafaudage devenu inutile côté tarnais, mais il faut installer un câble transbordeur de 4 tonnes pour transporter les tronçons assemblés au dessus du Viaur. Le plus dur reste à faire : le montage des deux demi-arc centraux. À plus de 100 mètres au dessus du Viaur la mise en place d’un échafaudage n’est plus possible. Cette difficulté est résolue par la création d’une plate-forme roulante de 131 tonnes équipée d’une grue pivotante de 5 tonnes et d’un échafaudage suspendu, mobile sur deux poutres débordant de 20 mètres au dessus du vide. Ce dispositif ingénieux autorise la manipulation et la mise en place d’ensembles complexes par plusieurs ouvriers. Enfin, le 4 juillet 1902, les demi-arcs terminés, sont reliés au point X par la clé articulée.
6.Inauguration et mise en service
La curiosité et le scepticisme ont attiré de nombreux badauds pendant et après la construction. Un témoin prétend que le premier chauffeur sauta de la locomotive avant le franchissement du viaduc. Son inauguration eut lieu le 5 octobre 1902, avant que les tests de résistance et les travaux de peinture soient achevés.
Elle fut malheureusement un peu ratée. Le train inaugural formé à Rodez en présence d’Émile Maruéjouls, ministre des Travaux publics, mais aussi député de l’Aveyron et président du Conseil Général de l’Aveyron, s’arrêta au milieu du viaduc pour graver avec la presse cet instant historique. Ensuite, dès qu’il atteignit la rive tarnaise, il s’empressa de faire demi-tour. L’événement festif qui devait réunir Aveyronnais et Tarnais fut boudé par les seconds, pourtant présents en grand nombre. C’est le symbole même du viaduc qui fut bafoué. Une plaque fixée sur l’ouvrage immortalise cette inauguration et rassemble noms et fonctions d’une bonne douzaine de personnalités concernées par l’évènement.
La résistance de l’ouvrage fut testée par deux types d’essai. Les uns, statiques, consistaient à mesurer les déformations entraînées par la présence sur la voie d’un train dont le nombre de wagons croissait jusqu’à 35. Les autres, dynamiques, faisaient varier la vitesse de 20 à 40 km/h, d’un train long de près de 200 mètres pour une charge proche de 1000 tonnes. Les résultats mesurés se sont révélés compris dans les intervalles de tolérance définis pour chacun des points fixes A,B,M,N et X de l’ouvrage.
La mise en service de la ligne débuta le 18 décembre 1902, la vitesse étant limitée à 80 km/h
La ligne française du Yunnan
Un peu d’histoire
Le chemin de fer du Yunnan, dont on parle beaucoup depuis quelques années car il a fait l’objet de nombreuses publications et documentaires télévisés fut le chantier le plus extravagant de la Colonisation française.
En 1898, Paul Doumer, alors gouverneur de l’Indochine, réalise un accord avec les autorités chinoises en vue de l’attribution à la France d’une concession pour la construction en territoire yunnanais d’une voie ferrée française. Bien que les territoires à traverser soient des plus inhospitaliers, rien n’est trop fou pour relier au Tonkin la Chine et son potentiel économique que l’on imagine immense, en particulier au Yunnan, l’une des plus belles régions du monde qui regorge de mines et aussi de cultures agricoles prospères. Il s’agit aussi de tenter d’équilibrer la suprématie des anglais qui construisent plusieurs grandes lignes à l’Est du pays.
Long de 860 km au total, dont 465 km en Chine, la ligne doit relier le port de Haiphong à Yunnanfu, la capitale du Yunnan, aujourd’hui appelée Kunming. Construit en un délai record de 6 ans, entre 1903 et 1909 par la Société des Batignolles, le chemin de fer est finalement inauguré le 31 mars 1910. À noter que le viaduc du Viaur a été inauguré en 1902, le Pont du faux Namti en 1907.
La ligne part du niveau de la mer, monte à 2025 m d’altitude à travers un paysage extrêmement accidenté, et représente avec ses 3 422 viaducs, ponts et aqueducs (plus de 7 par km) et ses 155 tunnels l’une des lignes les plus audacieuses et les plus pittoresques du monde.
Le pont sur la rivière dite du Faux Namti, également appelé Pont aux Arbalétriers, est baptisé par les chinois Pont Renzi, ou pont de l’Homme car le caractère qui le symbolise fait penser à un homme enjambant le ravin. Il s’agit d’un ouvrage exceptionnel qui relie deux tunnels, il fait 57 m de long et une centaine de mètres de haut. La vue d’aval que l’on a de cet admirable ouvrage d’art et le gouffre saisissant qu’il franchit laisse une impression particulièrement profonde. Selon les mots d’un contemporain, « C‘est une véritable vision, frémissante, qui vous étreint et ne vous quitte jamais. »
Au total, la construction de la ligne nécessita 60 000 ouvriers et ingénieurs et entre les accidents, les épidémies, le paludisme et autres noyades, coûta la vie à 12000 chinois et annamites et à près de 1000 européens. La nourriture des ouvriers nécessita 6.485.000 kg de riz et le paiement en piastres d’argent venues du Tonkin représentait un poids de 14.000 kg par mois. Tous les matériaux, y compris pour la construction des gares, venaient de France.
Une exploitation reconvertie
Les premiers mois d’exploitation furent très pénibles : éboulements de rochers, affaissements de terrain, inondations, et surtout attaques répétées de « pirates » chinois opposés à cette intrusion sur leur territoire.
Le trafic était très lent ( deux jours et demi pour aller de Hanoi à Kunming, ramenés à un jour après l’introduction de la micheline en 1935 ! ) et restera relativement modeste, réservé aux déplacements des populations locales et à l’approvisionnement des marchés locaux, mais aussi à un trafic prospère de l’opium. Il s’intensifiera au moment de l’occupation japonaise du Vietnam entre 1937 et 1940 où la ligne permet de ravitailler le gouvernement chinois réfugié à l’Ouest du pays. Elle fut d’ailleurs bombardée par les japonais qui détruisirent certains ponts – et aussi démontée de leur côté de la frontière par les chinois qui craignaient une invasion japonaise venue du sud. L’exploitation fut reprise par la Chine après la révolution en 1949.
Cette exploitation est toutefois abandonnée progressivement, à cause de la cherté de la maintenance et aux dangers dus aux chutes des pierres, mais aussi au développement de moyens de transport plus modernes. Un train express relie actuellement Kunming à la frontière vietnamienne, et un TGV faisant le détour par la côte permet de rejoindre Hanoi. Très rapidement, la ligne cesse son activité en 2018, mais il existe un projet de train touristique, et un dossier de demande d’inscription au Patrimoine Culturel mondial de l’UNESCO est en projet.
Les Chinois sont, en effet, fiers du tour de force technologique que représente la ligne qu’ils se sont appropriés et la considèrent comme un trésor patrimonial de leur pays.
Il faut toutefois rappeler que cette construction pharaonique qui coûta une fortune à la France (165 millions de francs or pour les 465 km de la partie chinoise alors que la partie vietnamienne – 385 km – n’avait coûté « que » 78 millions), sans vraiment rapporter grand chose au final, n’avait pas que des supporters en dehors du « parti des coloniaux » et autres amis de Paul Doumer. À cet égard, il est passionnant de lire les lettres et la biographie d’un personnage hors normes, Auguste François, grand voyageur, lettré, linguiste, photographe auteur des premières photos sur plaques de verre de la Chine. Il fut consul de France à Yunnan au moment des préparatifs de la construction de la ligne. En opposition constante avec Paul Doumer et les financiers à l’origine du projet, il avait écrit au ministre des Affaires Étrangères Delcassé, sa crainte (je cite) « de pourvoir d’une voie ferrée l’envahisseur possible, et même probable, de notre Indochine ».
Utilisé par les chinois pour pourvoir vivres et armements au Vietminh, le chemin de fer se retourna en effet contre ses créateurs : conclusion superbe et héroïque, ainsi que l’écrit Lucien Bodard dans ‘Les grandes murailles’, la ligne contribue finalement à l’humiliation, à la déroute de l’armée française, et à la catastrophe de Dien Bien Phu. Et en 1999, on vit l’invasion du Vietnam par la Chine.
Un peu de géographie
Le district de Pinbiang, que la préfecture de Hongze a proposé comme partenaire à Tanus, est la zone peuplée la plus proche du Pont aux Arbalétriers. Il fait 1905 km2, est situé à 1414 m d’altitude et à 24 km de la frontière vietnamienne. Sa capitale, Pingbian, regroupe une grande partie des habitants, que le gouvernement encourage à quitter les villages isolés. La population (149 000 habitants) est à plus de 60 % Miao, cette ethnie que les français appelle H’mong, et dont les membres ont massivement migré par vagues successives au Laos, en Thaïlande et au Vietnam.
Il s’agit d’une région principalement agricole peuplée de petits et moyens paysans qui se livrent à l’agro-foresterie. Les principales cultures sont les fruits et légumes, le thé, le chanvre, le tabac, le bambou et les plantes médicinales. Il s’agit en effet d’une région très riche en matière de biodiversité dont l’écosystème a été classé par le World Wide Fund for Nature (WWF) parmi les 200 plus riches du monde, avec 319 plantes indigènes et 555 races d’animaux distincts. Les traditions sont très vivantes, les costumes chatoyants, les coiffes et les bijoux très pittoresques.
Les rizières millénaires et absolument extraordinaires de Yuanyuang, situés dans le district de Hongze ont fait l’objet du classement au patrimoine mondial de l’UNESCO.
L’écotourisme est donc une source importante de revenus pour les Miaos, dont le revenu s’est considérablement élevé depuis une vingtaine d’années et qui disposent d’une autonomie relative car appartenant à un district classé comme étant peuplé de « minorités ». Par exemple, la loi dite de l’enfant unique ne s ‘y appliquait pas. Mais dans les faits la centralisation reste très puissante.
Aujourd’hui, de gros changements sont en cours. La région était, en effet, traditionnellement enclavée , mais sa situation particulière fait qu’elle appartient désormais à une nouvelle zone définie par l’ASEAN ( Association des Nations du Sud Est Asiatique) comme une zone de développement intégré dite Subrégion du haut Mékong. Elle connaît une expansion rapide grâce au commerce qui se développe avec le Vietnam, le Myanmar, le Laos et le Cambodge où vivent précisément beaucoup de Miaos . De nombreux problèmes liés à la protection de l’environnement et par exemple à l’utilisation des eaux du Mékong apparaissent. Certains voient dans cette intégration économique à marche forcée, accompagnée de la construction d’un train à voie rapide et d’une autoroute pan- asiatique par la Chine, l’avancée d’une hégémonie politique de l’ancien « Empire du Milieu » dans une zone hautement stratégique.
Bernard SCHMITT
Bibliographie :
- A dos d’âne et toujours dans le bon sens, Ponts et viaducs du Tarn. : ouvrage collectif, rédigé à l’occasion de l’exposition au centre culturel de l’Albigeois – 15 avril/15 mai 1994.
- Le Viaduc du Viaur : Révolutions ferroviaire et socio-économique. Auteur : François Garcia.
- Divers articles dans Wikipédia.